Dixième série

 

Dixième série

 

À un jeune moniteur du Département d'éducation physique, qui a commencé de correspondre avec la Mère à l'âge de dix-neuf ans. 

 

Douce Mère,

La nuit du vendredi 8, j'ai fait un rêve très particulier. Je n'ai pas pu te le raconter au Terrain de Jeux, alors je te dis maintenant.

C'était un très beau jour, très spécial. Il y avait une réunion importante au Terrain de Jeux et je me dépêchais d'y aller. Mais prés du Terrain de Jeux, devant la boutique de "Standard Stores", la roule était couverte d'innombrables serpents. J'étais surpris et j'avais bien peur. Alors/ai voulu prendre un autre chemin pour aller au Terrain de Jeux. Juste à ce moment-là, quelque chose m'a dit au-dedans : "Quoi! as-tu peur des serpents? Allons, prends courage et passe à travers eux. Ils ne te feront pas de mal." J'ai passé au milieu d'eux en toute confiance. Pas un seul ne m'a dérangé et je ne les ai pas comme je parlais avec mon ami, tout d'un coup il a fait un bond en arrière avec effroi et il m'a dit: "Attention, il y a un serpent enroulé autour de ton bras et puis un autre sur l'autre bras, et aussi autour de tes jambes et de tes chevilles. "Je n'avais pas senti leur présence jusqu'alors, mais je n'étais pas le, moins du monde effrayé. Je les ai pris un par un et je les ai jetés. L'un des serpents était mort parce que j'avais marché dessus.

C'est tout ce dont je me souviens clairement. Ce qui s'est passé ensuite au Terrain de Jeux n'est pas clair dans ma mémoire.

Mère, que penses-tu de ce rêve ?

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Ce rêve est vraiment très intéressant. Les serpents indiquent généralement les mauvaises pensées ou les mauvaises volontés des gens qui vous entourent — ou une attaque hostile qui peut se traduire par une maladie. Mais comme tu en as eu clairement l'expérience dans ton rêve, si tu n'as pas peur et continues ton chemin sans inquiétude, rien de mal ne t'arrivera.

Avec mes bénédictions.

Le 13 octobre 1954  

Douce Mère,

De temps en temps, il y a un jaillissement de mauvaises pensées; le mental devient comme un bourbier de passions et je me roule là-dedans comme un ver. Au bout d'un certain temps, je me réveille et je me repens de mes pensées. Mais cette sorte de bataille continue à se répéter. S'il te plaît, aide-moi à en sortir.

 

Il faut continuer à lutter contre les mauvaises pensées Jusqu'à ce que tu remportes une victoire totale. Mon Aide est toujours avec toi ainsi que mes bénédictions.

Le 26 janvier 1961  

Douce Mère,

Ici, nos activités sont si diverses qu'il est difficile d'aller jusqu'au bout d'une même chose. C'est peut-être la raison pour laquelle nous ne sommes pas capables d'aller au-delà d'une moyenne médiocre. Ou bien, est-ce à causé de notre manque de concentration solide ?

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Ce n'est pas la variété et le nombre des activités qui sont la cause de la médiocrité du travail, mais l'absence de pouvoir de concentration.

Il faut apprendre à se concentrer et faire tout ce que l'on fait avec une pleine concentration.

Le 4 juillet 1961 

Douce Mère,

C'est vraiment un problème si l'on veut éveiller l'intérêt des élèves, que ce soi! pour les Jeux, l'athlétisme ou la gymnastique. Même notre enthousiasme se fatigue quand on voit leur manque à'intérêt pour tout.

 

L'intérêt des élèves est proportionnel à la vraie capacité de celui qui enseigne.

Le 12 Juillet 1961

 

(À propos de Lost Footsteps par Sylviu Craciunas.) Ce livre montre comment Sri Aurobindo travaille aux quatre coins, du monde. Nous qui sommes ici, à l'Ashram, nous ne l'avons même pas encore entr'aperçu.

 

Il y a des gens ici qui le voient et sont constamment en contact avec lui. Ce sont ceux qui l'aiment sincèrement et suffisamment pour vivre selon son idéal.

Le 14 juillet 1961

 

(À propos du message du mois de mars 1961 où Mère s'adresse aux Capitaines, leur demandant de devenir une "élite".) Nous sommes très loin de ce que tu demandes de nous, du moins je le suis. C'est une lâche très ardue et cela prendra du temps, beaucoup de temps, mais que faire à présent ! Changer noire conscience et devenir une élite prendra beaucoup de temps. À présent, nous sommes au même niveau que nos élèves, alors le problème immédiat n'est pas résolu. Comment créer un intérêt en eux pour chaque chose et chaque jour ?

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C'est encore plus impossible que de changer et de devenir une élite. Ainsi, le mieux est de se mettre immédiatement au travail. Le reste est seulement une excuse que notre paresse se donne à elle-même.

Le 15 juillet 1961 

Douce Mère,

Je suis allé travailler seulement une heure, car j'avais trop de travail chez moi.

 

Ce n'est pas bon, le travail collectif ne doit pas souffrir à cause du travail personnel.

Le 19 juillet 1961  

Douce Mère,

Quand je suis venu ce soir à Toi pour la "Prospérité¹", j'ai senti une sorte d'inquiétude — comme si j'avais commis une faute —, au lieu d'avoir la sensation de la joie de Te voir. On doit être ardent pour recevoir Tes bénédictions, mais pourquoi n 'ai-je pas ce sentiment ?

 

Il doit y avoir encore quelque insincérité dans ton être, cachée dans un coin obscur, quelque chose qui ne veut pas changer et craint la Lumière.

Le 1er août 1961  

Douce Mère,

Aujourd'hui, je n'avais pas cette appréhension de venir à Toi, mais c'était un état passif.

 

¹Le premier de chaque mois, un service de l'Ashram, "Prospérité", fournil aux sâdhaks les articles de première nécessité.

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Je veux au contraire sentir une joie intense, un moment d'extase. Comment l'obtenir ?

 

Viens avec l'aspiration de te donner, d'offrir tout ton être, sans réserve, à la Grâce Divine, et tu sentiras la félicité à laquelle tu aspires.

Le 6 août 1961  

Douce Mère,

Je veux une lampe électrique dans le couloir de ma chambre.

 

Il serait plus correct d'écrire (et surtout de penser) : "Serait-il possible d'avoir une lampe électrique dans le couloir ?"

Il est bon que l'ego devienne un peu plus modeste.

Le 13 août 1961 

Douce Mère,

J'ai certaines choses à Te confesser, mais je n'arrive pas à me décider. Que faire? Me confesser ou laisser les choses passées s'effacer dans l'oubli du passé ?

 

Si tu peux vraiment les laisser s'effacer et ne plus être, même dans ton souvenir, c'est mieux.

Le 3 septembre 1961 

Douce Mère,

Tu nous as dit : "Tout le monde prend la vie très légèrement, on s'amuse à chaque moment, on est tellement égocentrique." Il est tout à fait vrai que nous prenons la vie très légèrement, et c'est devenu si naturel que l'on pense que c'est l'attitude correcte. Et nous sommes égocentriques. Comment sortir de ce piège ? En tout cas, le dosage de ce matin — ce que Tu nous as donné

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— était juste ce dont nous avions besoin. Je me sens très heureux.

 

Le premier point est de ne pas se placer en pensée, en sentiment et en action au centre de l'univers, de sone qu'Il n'existe qu'en fonction de soi-même — on fait partie de l'univers. On peut s'unifier à lui, mais seul le Seigneur Suprême est son centre, parce qu'il le dépasse et le contient.

Le 19 septembre 1961

 

Dans l'aphorisme N° 95, Sri Aurobindo dit que c'est seulement en renonçant ou en satisfaisant parfaitement le désir qu'on peut avoir l'expérience totale de Dieu¹. Mais la deuxième méthode (en satisfaisant parfaitement le désir) n'est-elle pas très dangereuse, car est-il possible de satisfaire le désir de l'homme ?

 

Ailleurs, il dit explicitement qu'il est inutile d'essayer de satisfaire le désir, car le désir est insatiable et ne peut jamais être satisfait.

Ce qu'il écrit ne doit pas être pris séparément, cela fait toujours partie d'un tout qui est une synthèse de tous les contraires.

Le 27 septembre 1961 

Douce Mère,

Nous parlons très souvent du psychique et de l'âme, je ne comprends rien à ces choses. Quelles sont ces deux choses et comment en avoir l'expérience ?

 

Sri Aurobindo a beaucoup écrit à ce sujet (dans ses lettres) et j'ai tout expliqué aussi dans le livre Éducation.

 

¹C'est seulement en renonçant parfaitement au désir ou en le satisfaisant parfaitement que Dieu peut venir nous embrasser absolument, car, dans les deux cas, la condition première est remplie: le désir meurt." (La Mère, Pensées et Aphorismes de Sri Aurobindo, éd.1979, p.217.)

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Il faut lire, étudier et surtout pratiquer.

Le 4 octobre 1961 

Douce Mère,

J'ai remarqué une chose : quand je m'assois quelques minutes pour faire un effort de concentration avant de dormir, je me réveille bien tôt et bien frais le jour suivant. Je me concentre sur le petit point lumineux de l'encens. Mais comment se fait-il que je me réveille tôt à cause de cela ? Il n 'y a pas de rapport entre ces deux choses !

 

Au contraire, il y a un rapport très concret. Quand tu te concentres avant de dormir, [u restes dans ton sommeil en rapport avec la force Divine, tandis que si tu tombes lourdement dans le sommeil sans concentration préliminaire, [u t'enfonces dans l'inconscient et le sommeil est plus une fatigue qu'un repos et il est difficile de sortir de cet abrutis.

Le 8 octobre 1961

 

Je voudrais que tu regardes attentivement en toi-même et que tu tâches de m'expliquer ce qui exactement t'amuse dans les histoires de détectives.

Le 16 octobre 1961 

Douce Mère,

Je les lis comme une relaxation. Dans les histoires de détectives (surtout Perry Mason), il y a toujours une scène à la cour où l'avocat Perry Mason est sûr de perdre sa cause, son client est accusé de meurtre, foutes les preuves sont contre lui, mais le coup de maître de l'avocat Perry Mason change la situation. Tout au long de l'histoire, il y a des mystères et le procès est comme une acrobatie mentale d'un maître gymnaste. Mais chaque fois que je termine son livre, je sens que je n'ai rien gagné, rien appris de nouveau, c'était une perte de temps. 

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Ce n'est pas absolument inutile ; sans doute avais-tu beaucoup de lamas dans ton mental et l'acrobatie mentale de l'auteur secoue un peu ce tamas et éveille le mental.  Mais cela ne peut avoir qu'un temps et bientôt il faut se tourner vers des choses supérieures.

Le 16 octobre 1961

 

(Le jour de Lakshmî-poûdjâ, après le Darshan de la Mère.) J'attends le jour où cette joie et cette félicité s'établiront pour toujours en moi. Maintenant, ce n'est qu'un rêve et une expérience passagère comme aujourd'hui: Mais j'espère la réaliser pour toujours par Ton Aide.

 

Persiste dans ton aspiration et le rêve se réalisera.

Le 21 octobre 1961  

Douce Mère,

J'ai remarqué une chose pour nous tous, c'est que nous prenons part à autant d'activités que possible au programme du 2 décembre¹. Ne vaut-il pas mieux choisir un ou deux sports et donner une très bonne démonstration dans ces sports-là que de faire plusieurs sports d'une façon médiocre?

 

Chacun fait selon sa nature et s'il (ou si elfe) suit courageusement et sincèrement la loi de sa nature, il ou elle agit selon la vérité. Ainsi, il est impossible de juger et de décider pour les autres.  On ne peut savoir que pour soi-même, et encore faut-il être très sincère pour ne pas se tromper.

Le 4 novembre 1961  

¹La Démonstration de culture physique tenue chaque année au Terrain de Sports de l'Ashram.

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Douce Mère,

Dans cet aphorisme N° 133, Sri Aurobindo dit que "les dieux n'ont su accepter que le fardeau plaisant de Son amour et de Son extase plus aimable¹." Alors les dieux sont des lâches! Où donc est leur grandeur et leur splendeur ? Pourquoi adorons-nous des entités inférieures? Et les Titans doivent être les plus aimables fils du Divin ?

 

Ce que Sri Aurobindo écrit là est un paradoxe pour éveiller les esprits un peu endormis. Mais il faut comprendre toute l'ironie contenue dans ces phrases et surtout l'intention qu'il met derrière les mots. D'ailleurs, lâches ou non, je ne vois aucune nécessité que nous adorions les dieux, petits ou grands. Notre adoration doit aller seulement au Seigneur Suprême, un en toutes choses et en tout être.

Le 6 novembre 1961  

Douce Mère,

J'ai remarqué depuis longtemps en moi que je suis un peu timide. J'ai toujours un complexe d'infériorité. Je crois que j'ai peur qu'on découvre mon ignorance. Pourquoi suis-je comme cela ? Et comment sortir de là ?

 

Derrière tout cela et ce fameux complexe d'infériorité, il y a "ego" et sa vanité qui veut faire bonne figure et être apprécié par les autres. Mais si toute ton activité était une offrande au Divin, tu n'aurais aucun souci de l'appréciation des autres.

Le 14 novembre 1961

 

¹"Les Titans soin plus forts que les dieux parce qu'ils se sont mis d'accord avec Dieu pour affronter et porter le fardeau de Sa colère et de Son inimitié; les dieux n'ont su accepter que le fardeau plaisant de Son amour et de Son extase plus aimable." (La Mère, Pensées et Aphorismes, de Sri Aurobindo, éd. 1979, p. 293.)

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Douce Mère,

Tu nous as dit souvent que nos activités devaient être une offrande au Divin. Qu'est-ce que cela veut dire exactement, et comment faire ? Par exemple, quand on joue au tennis ou au basket-ball, comment le fait-on comme une offrande ? Les formations mentales ne suffisent pas, naturellement !

 

Cela veut dire que ce que vous faites ne doit pas être fait dans un but personnel, égoïste, pour le succès, pour la gloire, pour le gain, pour un profit matériel ou d'amour-propre, mais comme un service et une offrande, pour devenir plus conscient de la volonté divine et pour se donner plus entièrement à elle, jusqu'au moment où l'on a fait assez de progrès pour savoir et sentir que c'est le Divin qui agit en vous, Sa force qui vous anime et Sa volonté qui vous soutient — non seulement une connaissance mentale, niais la sincérité d'un état de conscience et le pouvoir d'une expérience vécue.

Pour que cela soit possible, tous les mobiles égoïstes et toutes les réactions égoïstes doivent disparaître.

Le 20 novembre 1961 

Douce Mère,

Je Te prie de la part de tout le monde afin que la démonstration de ce soir soit un succès. Tout le monde pense que ce sera le contraire... Il est vrai que notre exécution n'est pas à la hauteur. J'espère et je Te prie que l'exécution soit la meilleure possible ce soir. Prends nos actions, Douce Mère, et guide-nous. Tu nous as dit que Tu serais ta — si seulement j'avais les yeux pour Te voir !

 

Ce que moi, j'ai vu, le 26, était satisfaisant (naturellement cela peut toujours être mieux), et j'ai entendu beaucoup de compliments de la séance du 2 décembre. Il ne faut pas écouter les gens qui ne savent que critiquer. Une critique exagérée n'aide pas au progrès. 

Le 2 décembre 1961

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Douce Mère,

Je suis très paresseux et je manque de ferveur et de persévérance pour continuer le chemin choisi. Je suis comme une flamme qui s'anime et monte avec le vent, et retombe morte ou mourante aussitôt que le vent s'arrête. Vigilant, c'est cela que je dois être. Mais comment ?

 

Toutes les qualités psychologiques se cultivent comme les muscles avec un exercice régulier et quotidien. Et surtout, tourne-toi vers la Force Divine dans une aspiration sincère et implore afin d'être délivré de tes limitations. Si tu es sincère dans ta volonté de progresser, tu es sûr d'avancer.

Le 21 janvier 1962 

Douce Mère,

J'ai été surpris de voir ce nouveau rituel "Sri Aurobindo Sharanam mama¹" introduit dans les cérémonies du cimetière. X se met debout en méditation devant le corps et prononce la phrase "Sri Aurobindo shawanèse marna" et les autres, qui se sont placés autour du corps, doivent la répéter après lui. Cela continue une centaine de fois. Personnellement, je n'aime pas celte cérémonie. Je la sens vide d'émotion. Prendre le nom de Sri Aurobindo sans l'émotion et en faire un rituel, je n'aime pas. Il vaut beaucoup mieux lire une "prière" de Toi, et puis invoquer la Grâce Divine, chacun à sa manière, en silence, pour le bien du mort, comme on le faisait avant. C'est mon opinion.

 

¹"Sri Aurobindo est mon refuge."

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La cérémonie en elle-même n'a qu'une importance secondaire. C'est seulement une forme et plus une question d'habitude qu'autre chose. Ce qui est important, quelle que soit la cérémonie que l'on adopte, c'est d'y mettre la ferveur sincère et l'aspiration ardente qui rendent vivante toute cérémonie, quelle qu'elle soit, et qui ne dépendent pas d'elle.

Le 6 février 1962 

Douce Mère,

Sri Aurobindo dit qu'il y a cinq mille ans que la grande bataille de Kouroukshétra a été livrée. Mais la bonne influence du génie politique de Shri Krishna s'est terminée juste hier avec Rani Lakshmîbaï¹. Ensuite, pour protéger de nouveau l'Inde et le monde, il fallait un Poûrna Avatar². Cet Avatar va éveiller le Brahmatej³ qui est endormi. Sri Aurobindo dit aussi que c'est au Kaliyouga4 que le Divin se manifeste pleinement, car l'homme est en grand danger à cette époque — et le voilà, il révèle lui-même le grand secret; le Divin est pleinement manifesté dans l'Inde. Mais il a la modestie de ne pas dire que c'est lui-même qui est cette manifestation !

 

Ceux qui accomplissent l'œuvre n'ont pas l'habitude de se vanter. Ils gardent leur énergie pour le travail et laissent la gloire des résultats au Seigneur Éternel.

Le 6 mars 1962  

Douce Mère,

Je peux Te dire ceci sans être vain : je suis beaucoup mieux que je n 'étais auparavant, mais tout de même bien loin et peut-être très loin de l'Idéal que Tu nous as donné. Cela ne me décourage pas, car j'ai pleine confiance en Toi.

 

¹Reine de Jhansi qui combattit toute seule les armees anglaises et mourut sur le champ de bataille en 1857,

²L'Avatâr complet. 

³La Puissance spirituelle.

4L'"Âge Noir", où nous sommes.

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Oui, i! faut persévérer avec courage et sincérité. Tu es sûr de réussir un jour.

Le 2 septembre 1962  

Douce Mère,

Nous avons eu une discussion avec des amis sur le problème et les méthodes possibles d'éducation physique. Le problème fondamental est celui-ci: comment établir un programme qui contentera tout le monde et qui sera aussi efficace que possible pour tous les membres en général? Les tournois sont-ils nécessaires, ne doit-il y avoir aucune contrainte d'aucune sorte ? Et si on laisse une liberté complète, est-ce pratique? etc... C'est un sujet auquel il n'est pas facile de trouver une réponse suffisamment satisfaisante pour tout le monde, sauf quand la Mère interviendra Elle-même.

 

C'est impossible. Chacun a son propre goût et son propre tempérament. On ne peut rien faire sans discipline — la vie tout entière est une discipline.

Le 20 septembre 1962 

Douce Mère,

Est-il mauvais d'aller au cinéma en ville ?

 

Pour ceux qui veulent faire le yoga, c'est très mauvais. J'ai d'ailleurs dit cela déjà un nombre considérable de fois et si on ne le sait pas, c'est que l'on trouve plus commode de l'oublier.

Le 27 septembre 1962  

Douce Mère,

Il y a trop de noeuds bien serrés dans cette immense organisation de l'Ashram. Quand viendra joie et de la paix sans mélange ?

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Si chacun était plus soucieux de corriger ses propres fautes que de critiquer celles des autres, le travail irait plus vite.

Le 29 septembre 1962 

Un peu de pratique sincère et régulière vaut mieux que beaucoup de résolutions éphémères.

Le 2 octobre 1962

Douce Mère,

J'ai entendu dire ce matin que X avait été battu très sérieusement par Y. Je crois que ce n'est cas du tout juste.

 

On ne peut parler que de ce que l'on a vu de ses propres yeux — et encore... Quelle connaissance possède-t-on qui vous donne le droit de Juger ? Seul le Seigneur voit et sait — Lui seul est la Vérité.

Tu devrais étudier un peu mieux les aphorismes de Sri Aurobindo. Cela te guérirait de porter des jugements.

Le 15 octobre 1962  

Douce Mère,

J'ai écrit une lettre à la Mère en demandant pourquoi Elle n'avait pas donné Son darshan à Z. Mais j'ai peur maintenant que, peut-être, Mère se fâchera de mon audace à écrire une telle lettre. Car ce n 'est pas mon affaire du tout !

 

J'ai lu la lettre et je ne me suis pas fâchée du tout. Mais Z n'était pas du tout prêt pour un darshan.

Le 19 octobre 1962

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(À propos de la Chine qui a menacé d'occuper les territoires contestes au nord du Cachemire et au nord-est de l'Inde,) Parfois, fui l'impression que nos gouvernants ne semblent pas avoir une colonne vertébrale à la hauteur de celle de Kennedy et de sa décision pour Cuba.

 

Ce genre de réflexion est tout à fait déplacé en ce moment. Il ne faut jamais critiquer quelqu'un si l'on n'a pas trouvé d'une façon indiscutable que, dans les mêmes circonstances, on peut faire mieux que lui.

Te sens-tu capable d'être un premier ministre de l'Inde inégalable ? Je réponds : certainement non, et te conseille de te taire et de rester tranquille.

Le 24 octobre 1962

 

(À propos d'une prière pour le Jour de Kâlîpoûdjâ)

 

C'est bien, mes enfants, mais ce n'est pas assez de prier, il faut aussi faire effort avec persévérance.

Le 26 octobre 1962 

Douce Mère,

Dans une discussion avec un ami à propos de notre programme d'éducation physique et autres activités innombrables que nous avons ici, il m'a demandé : "Peux-tu me donner un exemple valable d'une personne, an moins, qui participe à autant d'activités et qui garde un niveau assez haut — une seule personne dans le monde tout entier?"

 

N'oubliez pas — vous tous qui êtes ici — que nous voulons réaliser quelque chose qui n'existe pas encore sur la terre ; ainsi il est absurde de chercher ailleurs un exemple de ce que nous voulons faire.

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Il me disait aussi ceci "Mère dit qu'il y a toute liberté et toutes les facilités pour ceux qui sont doués pour un sujet particulier et qui veulent le poursuivre au maximum. Mais où est cette liberté comme, par exemple, de devenir un grand musicien?" Douce Mère, peux-tu me dire quelques mots au sujet de cette liberté ?

 

La liberté dont Je parle est celle de suivre la volonté de l'âme, non celle de suivre toutes les fantaisies du vital et du mental.

La liberté dont je parle est une vérité austère qui tend à surmonter toutes les faiblesses et les désirs de l'être inférieur et ignorant.

La liberté dont je parie est celle de se consacrer entièrement et sans réserve a son aspiration la plus haute, la plus noble, la plus divine.

Lequel d'entre vous suit sincèrement ce chemin-là ? Il est facile de juger, mais il est plus difficile de comprendre et encore beaucoup plus difficile de réaliser.

Le 18 novembre 1962

 

(À propos d'un jugement porté sur quelqu'un par le moniteur.)

 

Souviens-toi que toutes ces vertus et ces fautes individuelles sont seulement l'apparence mensongère d'un grand jeu de forces universelles que l'on ne comprend pas.

Le 5 janvier 1963

 

(À propos d'une amie.)

 

Trouve ton bonheur et ta joie dans le fait seul d'aimer, et cela t'aidera dans ton progrès intérieur, parce que, si tu es sincère, tu t'apercevras un jour que c'est le Divin en elle que tu aimes et que la personne extérieure n'est qu'un prétexte.

Le 27 janvier 1963

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Douce Mère,

Quelle différence y a-t-il entre méditer ici, chez moi, et aller méditer là-bas, au Terrain de Jeux avec tout le monde ?

Vaut-il mieux méditer là, ou ici chez moi ?

 

Médite là où tu médites le mieux, c'est-à-dire là où tu es le plus silencieux et le plus tranquille.

Le 31 janvier 1963

 

(À propos d'un mauvais rêve.)

 

J'appelle cela de la fermentation mentale. Dès que ta conscience de veille s'endort ou quitte ton corps, les cellules cérébrales que tu n'as pas eu le soin de mettre au repos s'agitent sans ordre et sans contrôle et produisent ce que l'on appelle un rêve, mais qui n'est en somme qu'une activité déréglée. Cela n'a aucun sens et ne peut servir qu'à une chose, c'est à te rendre conscient de ce qui se passe dans ta tête.

Le 19 mars 1963  

Douce Mère,

J'ai reçu une certaine somme d'argent. Je veux Te l'offrir, et si j'ai besoin de quelque chose, je Te le demanderai; ainsi Tu peux décider pour moi ce qui est nécessaire ou meilleur pour moi. Mais on me conseille de garder autant que je veux pour mes besoins et de T'offrir le reste. Autrement les gens diront que je demande tout ce que je veux sous prétexte que J'ai donné un peu d'argent. Mère, que veux-Tu que je fasse ?

 

Fais comme tu sens — et tu peux être sûr que, quoi que ce soit que tu fasses, les gens auront toujours quelque chose à dire.

D'ailleurs, qui est parfaitement désintéressé ? Il ne faut pas faire semblant d'être ce que l'on n'est pas. Il vaut mieux être franc qu'hypocrite.

Le 12 avril 1963

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Douce Mère,

Est-ce bien d'adresser des prières à la Mère pour des petites choses et des gains égoïstes ?

 

Tout dépend du point de vue auquel on se place. Il est très possible que l'on obtienne la chose pour laquelle on a prié. Mais pour le progrès spirituel, c'est nuisible,

Le 4 mai 1963 

Douce Mère,

Quelle est la vraie signification du mariage ?

 

Cela n'a guère de signification vraie — c'est une habitude sociale pour la perpétuation de l'espèce.

Le 10 mai 1963  

Douce Mère.

Nous voyons trop de films ces jours-ci, et je ne sais pas comment ils nous éduquent!

 

Quand on a la vraie attitude, tout peut être une occasion d'apprendre.

En tout cas, cette abondance peut vous faire comprendre que le désir si impérieux, pour certains, de voir des films est aussi pernicieux que tous les autres désirs.

Le 11 mai 1963 

Douce Mère,

Chaque fois que j'ai rencontré un obstacle dans ma vie, chaque fois que j'ai été privé d'un bonheur — un semblant de bonheur —, une consolation m'est venue tout de suite pour dissiper ma douleur psychologique.

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Car quelque chose me dit : "Tout ce qui arrive est fait pour ton bien et par la Grâce Divine. " Est-ce bon et sain de penser ainsi ?

 

Non seulement c'est vrai, bon et sain de penser ainsi, mais c'est une attitude absolument indispensable si l'on veut avancer sur le chemin spirituel. A vrai dire, c'est le premier pas sans lequel on ne peut pas avancer du tout.  C'est pourquoi je dis toujours : "Tout ce que tu fais, fais-le le mieux que tu peux, et laisse le résultat au Seigneur; ainsi ion cœur sera en paix."

Le 13 mai 1963 

Douce Mère,

Les lignes de nos mains peuvent-elles refléter notre vie passée, présente et future ?

 

Certainement oui, pour quelqu'un qui sait voir, et X est très doué.

Le 15 mai 1963 

Douce Mère,

J'ai souvent noté que le travail que nous faisions était beaucoup plus vite fait et mieux fait que si les ouvriers le faisaient. Je ne sais pas pourquoi !

 

Parce que vous êtes plus conscients, ou plutôt moins inconscients.

Le 23 mai 1963 

Douce Mère,

Les filles ont toujours un désavantage : elles ne peuvent pas faire ce qu'elles veulent comme les garçons.

 

Pourquoi ?

On a des centaines de preuves du contraire.

Le 31 mai 1963

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Douce Mère,

Quelle est la meilleure relation entre deux êtres humains ? Mère et fils ? Frère, ami ou amant, etc... ?

 

Toutes les relations sont bonnes en principe et chacune d'elle exprime une manière d'être de Éternel Mais chacune peut-être pervertie et devenir mauvaise à cause du mensonge égoïste de la nature humaine qui empêche les vibrations d'amour de se manifester dans leur pureté.

Le 4 juin 1963

Douce Mère,

À propos du film "Reach for the Sky" et de son héros, je disais que rien ne pouvait le décourager, jamais. Même après avoir perdu ses deux jambes dans un accident, il a résolu de continuer sa carrière de pilote. C'est un homme d'une vitalité fantastique, plein d'énergie...

 

C'est justement ce genre de détermination qu'il faut pour pratiquer le yoga de la perfection intégrale.

Le 7 juin 1963 

Douce Mère,

Il y a des moments où je sens qu'il vaut mieux m'asseoir silencieusement au lieu de lire ou de faire autre chose. Mais je crains que ce temps ne soif perdu. Que dois-je faire ?

 

Tout dépend de la qualité du silence — si c'est un silence lumineux, plein de force et de concentration consciente, c'est bien. Si c'est un silence tamasique et inconscient, c'est nuisible.

Le 10 juin 1963 

Douce Mère,

Après longtemps, j'ai fait un beau rêve où j'ai vu la Mère la Mère et reçu Ses Bénédictions.

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Ce n'est pas un rêve, mais le résultat de la méditation précédente et de ton aspiration.

Le 12 juin 1963  

Douce Mère,

J'ai trop de matière "grise" dans ma tête qui m'empêche de penser clairement ci de saisir vite les idées nouvelles. Comment me libérer de cela?

 

En étudiant beaucoup, en réfléchissant beaucoup, en faisant des exercices intellectuels. Par exemple, en énonçant clairement une idée générale, puis en énonçant i'idée contraire, puis en cherchant la synthèse des deux idées, c'est-à-dire en trouvant une troisième idée qui harmonise les deux autres.

Le 25 juin 1965

 

(À propos de la lecture des romans.)

 

Pourquoi lis-tu des romans ? C'est une occupation stupide et une perte de temps. C'est certainement l'une des raisons pour lesquelles ion cerveau est encore en bouillie et manque de clarté.

Le 27 juin 1963 

Douce Mère,

L'homme est si faible qu'il est influencé même par le vent qui souffle autour de lui, par un livre qu 'il lit ou une image qu'il voit. il est très vulnérable.

 

Cela arrive quand il n'a pas pris le soin d'organiser son être conscient autour du centre psychique qui est la Vérité de son être.

Le 28 juin 1963

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Douce Mère,

La plupart des gens ici citent la Mère seulement pour leur commodité (il y a des cas précis).

 

Avant de critiquer les autres, il est bon de s'assurer que l'on est soi-même parfaitement sincère.

Le 30 juin 1963 

Douce Mère,

J'ai noté quelque chose de très bizarre dans ces enfants du groupe A2 il y a quelques jours : les garçons ne veulent pas travailler avec les filles ; ils ne veulent même pas rester l'un à côté de l'autre. Ils ne veulent pas être ensemble. Comment cette idée de différence est-elle venue dans ces petits enfants qui ont à peine onze ans!  C'est étrange.

 

C'est atavique, cela vient du subconscient. Cet instinct est basé, à la fois, sur l'orgueil masculin, l'idée stupide de supériorité, et la peur encore plus stupide basée sur l'idée que la femme est un cire dangereux qui vous attire dans le péché. Chez les enfants, tout cela est encore subconscient mais influence leurs actions.

Le 3 juillet 1963 

Douce Mère,

J 'ai fait sensation avec mes nouveaux vêtements ! Culotte bleue et chemise grise. X était choqué de me voir ainsi.

 

Faut-il que les gens soient futiles et superficiels pour attacher de l'importance à des choses pareilles ! ! Cependant, si c'est en qualité de capitaine que tu as revêtu ce costume, tu as eu tort ; car les capitaines ont un uniforme qu'ils doivent porter dans leur fonction de capitaine,

Le 4 juillet 1963

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